Egalité femme/homme durant le Congrès de la FUB 2023 : l'analyse complète

Sommaire​

34 % de participantes, 47 % d'intervenantes, et une répartition du temps de parole encore inégale
Des évènements très genrés en fonction des thématiques
Des inégalités qui se creusent entre ateliers et plénières
De 2022 à 2023, des inégalités stagnantes
Méthologie de la démarche
Avantages, limites et pistes d'amélioration
Conclusion

 

Pour déconstruire l’imaginaire voiture et participer au développement d’un système vélo accessible à toutes et tous, il est nécessaire de sortir de l’image « masculine et sportive du vélo » et de construire un système vélo adapté à tous·tes. La FUB peut y contribuer à travers sa représentativité et les personnes qu’elle appelle à s’exprimer pendant ses événements.

Cette année encore, la FUB prend acte qu’il lui reste de nombreux efforts à fournir. Voici l’analyse complète faisant suite au dispositif mis en place pour comptabiliser les prises de parole femme/homme durant les différents temps du congrès 2023.

 

34 % de participantes, 47 % d'intervenantes, et une répartition du temps de parole encore inégale

Les participantes au congrès représentaient 34 % de l’effectif de l’évènement, soit environ 200 femmes parmi les 600 personnes présentes.

Nous comptions 47% d’intervenantes durant les évènements.
Ce chiffre n’inclut pas l’animation, qui était à 38 % féminine et à 63 % masculine, pour un total de 45 % de femmes sur le devant de la scène[1].
Au total, il y a eu 33 femmes sur le devant de la scène pour 41 hommes.

Enfin, le temps de parole féminin total[2] est inférieur à 6 heures, tandis que celui des hommes est d’environ 9 heures. 39 % du temps de parole était donc féminin.

 

% participantes

Temps de parole féminin

Temps de parole masculin

% Temps de parole féminin

% de femmes « sur le
devant
de la scène »[3]

% intervenantes

% animatrices

TOTAL

34%

05h50

09h02

39%

45%

47%

38%

 

 

Des évènements très genrés en fonction des thématiques

Nous observons une répartition encore très genrée en fonction des thématiques : sur les 15 temps et ateliers du congrès, 9 ateliers ont amené à une répartition particulièrement inégale d’au moins 65 % du temps de parole pris par un seul genre.

Les évènements incluant des personnalités politiques tels que le discours d’ouverture ou bien le débat avec le ministre des Transports[4] sont ceux qui comptabilisent une répartition la plus inégale, avec respectivement 19 % et 22 % de temps de parole féminin. En effet, ces temps protocolaires reflètent les inégalités de genre dans les gouvernances et représentations des organisations.

Les temps d’échanges en lien avec léconomie – elle-même associée aux sphères de pouvoir et de décision - sont encore très largement masculins, comme en atteste la table ronde concernant la transition des emplois ou encore celle sur les investissements dans les routes, qui n’ont comptabilisées que 23 % de temps de parole féminin.

Les femmes ont été le plus présentes lors d’évènements associés avec la culture du vélo, son développement dans les zones rurales, et son déploiement dans nos imaginaires.

 

Pourcentage temps de parole féminin

Ratio femmes « sur le devant de la scène »[5]

Ratio animatrices

Ratio intervenantes

Discours d’ouverture

19 %

2/7

/

/

Débat en plénière avec le ministre des Transports et intervention de la députée Karima Delli 

22 %

3/7

0/1

3/6

Table ronde – De l’auto au vélo, penser la transition des emplois

23 %

1/6

0/1

1/5

Table ronde – Adapter nos routes au vélo, un investissement prioritaire pour le climat et la santé

23 %

1/4

0/1

1/3

Atelier 3 – Outils fiscaux

21 %

1/4

1/2

0/2

Atelier 4 – Vélo hors des agglos

80 %

3/5

0/1

3/4

Table ronde - Le vélo à la conquête des imaginaires

61 %

4/6

1/1

3/5

 

 

Des inégalités qui se creusent entre ateliers et plénières

Si le nombre d’intervenantes se rapproche de la moyenne, nous remarquons qu’elles étaient plus nombreuses lors des ateliers (50 %) en plus petit comité que durant les conférences en plénière (44 %).
Cet écart se creuse encore davantage s’agissant des animatrices, où seulement 17 % des temps en plénières ont été animés par des femmes, pour 50 % durant les ateliers.

Les prises de paroles féminines n’ont représenté que 33 % du temps de parole durant les conférences en plénières, tandis qu’elles représentaient 43 % du temps de parole durant les ateliers en plus petit comité.

 

Temps de parole féminin

Temps de parole masculin

% Temps de parole féminin

% de femmes « sur le devant de la scène »[6]

% intervenantes

% animatrices

TOTAL

05h50

09h02

39 %

45 %

47 %

38 %

Ateliers

04H01

05H23

43 %

50 %

50 %

50 %

Plénières

01H49

03H38

33 %

40 %

44 %

17 %

 

 

De 2022 à 2023, des inégalités stagnantes

Contrairement à 2022, nous avons annoncé et rendu visible la comptabilisation des prises de parole de chacun·e. Cependant, il n’y a pas eu d’améliorations significatives.
Le nombre de participantes a eu tendance à baisser, passant de 40 % à seulement un tiers des personnes présentes. Le nombre de femmes invitées à s’exprimer en public a légèrement augmenté, sans connaître de différences majeures, malgré la sensibilisation post-congrès 2022 et une certaine volonté de mieux faire au moment de prendre contact avec ces personnes.

 

 

Congrès 2022

Congrès 2023

Participantes

40 %

34 %

Femmes « sur le devant de la scène »

42 %

45 %

Temps de parole féminin

38 %

39 %

 

 

Méthologie de la démarche

Afin de mettre en œuvre ce dispositif de comptabilisation mais aussi de visibilisation de la représentation inégale femme/homme durant ces évènements, les animateurs·rices des plénières et des ateliers ont été intégré·e·s à la démarche, de même que 22 personnes ont chronométré et comptabilisé les prises de parole durant les différents temps du Congrès et de l’Assemblée Générale. Merci encore à elles et eux.

Les chronomètres mis en place ont été visibilisés à chaque début de journée par une intervention en plénière de Carole Kaouane, administratrice référente sur l’inclusivité. Celle-ci enjoignait également les participant·e·s à s’auto-réguler, laisser la place aux autres, mais aussi à se sentir légitimes de prendre la parole.
Les animateurs·rices ont reçu par mail une fiche préalable les invitant à veiller à une égale répartition des prises de parole.

Pour chaque plénière, deux personnes chronométraient les temps de parole des femmes et des hommes, via l’application « blablatime » qui permet d’accéder à deux chronomètres sur le même écran. Il leur a été demandé d’arrêter le chronomètre une fois que la personne avait terminé son intervention afin de ne pas comptabiliser les périodes de blanc entre deux prises de parole. Toutes les prises de parole devaient être comptabilisées (non seulement les intervenant·e·s, mais aussi les animateur·rices, les salarié·e·s FUB, les administrateurs·rices ou encore les interventions dans la salle), du début à la fin du temps. Nous avons ensuite réalisé des moyennes des deux chronomètres.

Pour chaque atelier, une personne chronométrait les temps de parole et une autre comptabilisait les prises de parole. La comptabilisation des prises de parole avait pour but de visibiliser le sujet, faire en sorte que les participant·e·s prennent conscience des inégalités dans les prises de parole et s’autorégulent. Les animateurs·rices d’atelier avaient pour mission de présenter les objectifs cités ci-dessus afin d’introduire le tableau de comptabilisation. Le choix leur était ensuite laissé d’intégrer ou non ces tableaux dans leur animation.
La comptabilisation était réalisée sur un grand tableau visible, avec un système de bâtons à côté des noms des personnes ayant pris la parole. A chaque première intervention, il s’agissait d’inviter la personne à donner son nom. Les personnes intervenantes et animatrices ont été comptabilisées dans les prises de parole.

Afin que tout le monde ait la même méthodologie et pour que ces étapes se passent pour le mieux, un mail a été envoyé à toutes les personnes ayant un rôle de chronomètre ou de comptage des prises de parole, avec une notice de fonctionnement de chaque rôle. Des temps d’échange rapides sur ces rôles étaient proposés chaque matin.

Les données ont été récupérées via un tableau commun et un groupe whatsapp.

 

Avantages, limites et pistes d'amélioration

Points positifs

Par rapport à l’année dernière, cette préparation plus importante a permis d’intégrer les animateurs·rices à la démarche. De même, cela a permis d’avoir un nombre conséquent de personnes tenant les rôles de chronomètre et de comptabilisation, avec une préparation préalable permettant d’avoir des données plus fiables. Il y a eu moins d’erreurs ou de « bugs », et personne n’avait à chronométrer pendant plus de 2 heures d’affilée, évitant des inattentions.

Il semblerait que le sujet ait été plus visible que l’année passée, aux vues des mentions régulières par des participant·e·s et intervenant·e·s pendant les plénières et ateliers. Nous avons eu connaissance d’associations et structures qui ont appréciées cette démarche et ont choisi de la mettre en place dans leur structure – ou a minima de visibiliser ce sujet auprès de leurs collègues.

 

Limites et pistes d’amélioration

Cette visibilisation du comptage des prises de parole n’a a priori eu que peu d’effets, car nous observons le même pourcentage de temps de parole entre 2022 et 2023, malgré un nombre légèrement plus élevé de femmes sur le devant de la scène. Cette observation est néanmoins à modérer car il y avait en général moins de participantes, ce qui peut également baisser la moyenne.

Cette visibilisation de la sous-représentation des femmes dans la sphère vélo, et notamment la mise en valeur des chronomètres et comptabilisation des prises de parole a parfois amené à des tournures maladroites, faisant peser une forme d’injonction sur les intervenantes et participantes à prendre la parole. Nous avons entendu à plusieurs reprises que certaines ont eu l’impression que la parole leur était donnée parce qu’elles étaient femmes et non pour la qualité de ce qu’elles avaient à dire.

  • > Il aurait pu être été utile de donner davantage de consignes aux animateurs·rices afin de les aider à répartir la parole sans créer d’injonctions. Parler de l’inégale répartition de la parole et mettre en place des outils sans cibler spécifiquement la différenciation entre femmes et hommes peut par exemple être un moyen d’éviter ces situations.

 

Le travail de chronomètre et de comptage a été réalisé sans demander le pronom ou le genre de la personne qui prenait la parole. Le choix d’inclure la personne dans la catégorie femme ou homme était basé sur l’apparence et le prénom de la personne. Cette méthode contribue à faire perdurer les stéréotypes de genre et cela a amené à des situations de mégenrage[7].
Ce prisme binaire femme/homme a de fait invisibilisé les personnes de minorités de genre. Elle ne permet également pas d’avoir un aperçu des potentielles inégalités de représentation de ces personnes, que nous considérons de fait comme non présentes.

  • > Une piste pourrait être de demander le genre des intervenant·es et participant·es lors de l’inscription. Prendre l’habitude de demander le pronom de la personne en plus de son nom pourrait également être un moyen d’éviter d’exclure de fait cette population minorisée.

 

Une majorité de femmes a réalisé le travail de comptage et de chronomètre des prises de parole. Ce sont autant de femmes qui – déjà occupées – n’ont pas pris la parole durant les différents temps d’échanges.

  • > Une piste pourrait être de veiller à une répartition équitable femme/homme des rôles au niveau des missions bénévoles ; voire de systématiser la détention de ces rôles à des hommes, en attendant que la représentation femme/homme soit devenue paritaire.

 

Outre ce travail réalisé durant le Congrès, il est nécessaire de se donner davantage les moyens en amont de l’évènement. Si la volonté d’une meilleure répartition femme/homme était présente au moment de choisir les intervenant·e·s, cela n’a pas suffi pour faire en sorte que la répartition soit égalitaire.

  • > Une charte spécifique à nos évènements inscrivant la parité ou a minima une meilleure répartition pourrait être un moyen de changer la donne. Cette charte pourrait également inclure la question des animateurs·rices et éviter une différenciation entre plénières et ateliers.
  • > Un travail en amont avec la communication pourrait également être un moyen d’attirer un public plus diversifié en termes de genre.
  • > S’agissant enfin de la répartition inégale en fonction des thématiques, nous pourrions imaginer l’année prochaine une inscription préalable avec un système de jauge.

Un questionnaire sera également transmis aux personnes ayant pris part à ce dispositif afin d’enrichir les pistes d’amélioration.

 

Conclusion

Une représentation diversifiée est essentielle afin de sortir de l’entre-soi. L’image projetée aujourd’hui doit tendre vers ce que l’on souhaite voir demain. Il s’agit d’une clé fondamentale afin de déconstruire l’ère automobile, fortement imbriquée avec le système patriarcal, et construire une ère du vélo juste, qui s’en distingue.

La FUB a encore un long chemin à parcourir afin de concrétiser sa volonté de représenter l’ensemble des usagers et usagères du vélo et de le rendre accessible au plus grand nombre, en commençant par donner la parole et parler à toutes.

 

 

Pour apporter votre témoignage, vos remarques et vos pistes, n’hésitez pas à nous contacter :

  • Bérengère SUBTIL, Chargée de plaidoyer. b.subtil@fub.fr
  • Carole KAOUANE, Administratrice référente égalité femme/homme et inclusivité. c.kaouane@fub.fr
 

[1] Animatrices + intervenantes

[2] Qui ne dissocie pas les durées d’animation, d’intervention ou de questions du public

[3] Animatrices + intervenantes

[4] L’intervention de la Députée Karima Delli après l’échange avec le Ministre a été incluse

[5] Animatrices + intervenantes

[6] Animatrices + intervenantes

[7] Personne que nous identifions à un genre qui n'est pas le sien