Pour améliorer la sécurité des cyclistes, la FUB réalise depuis plusieurs années des tests consuméristes sur l’éclairage [1] et sur les antivols pour vélos. Ces tests ont prouvé que les marques et le prix ne sont pas forcément un gage de performance.
Ces dernières années, la technologie des éclairages vélo a fortement progressé grâce aux leds, qui émettent 10 fois plus de lumière qu’une lampe halogène pour la même puissance et grâce aux batteries lithium [6]. En effet, 3 éléments lithium type 18650 à 9 € et 126g permettent d’alimenter un éclairage de 10Watt et 240g pour l’avant et 3W et 65g à l’arrière pendant 3 heures, avec une obsolescence de 4 à 5 ans. Le prix de l’éclairage avant va alors de 14 € à 200 € et de 6 € à 100 € et pour l’arrière.
Pour faire une comparaison avec les 3 éléments lithium, il faudrait 11 éléments NIMH de type AA, donc 330g avec un facteur 10 pour le prix, avec un volume assez conséquent.
Evidemment, pour les vélos à assistance électrique qui ont une batterie de 480W.h, l’éclairage peut durer 37 heures pour une puissance de 13W.
Les normes d'éclairages pour un vehicule demandent de voir et d’être vu [7].
Les normes sur les éclairages avant demandent un certain angle d’inclinaison et une ligne de coupure de l’éclairage pour ne pas éblouir. Donc, une exigence minimale et maximale d’éclairage à certains points. D’ailleurs, la norme allemande sur les éclairages vélo StVZO pose aussi une certaine exigence, mais sans exiger une inclinaison.
En ville, une rue bien éclairée nécessitera seulement un éclairage avant fournissant 10 lux à 10m.
Mais, hors agglomération, l'absence d'éclairage public nécessitant de mieux voir les obstacles (exemple : nids de poules, petits animaux, ...), mieux vaut prendre un éclairage atteignant 200 lux à 10m et diminuant à 20 lux à 15m.
Le besoin en distance d’éclairage va dépendre de la vitesse, mais en descente tout vélo peut dépasser 50km/h.
Pour l’éclairage arrière d’une voiture [7], par temps de brouillard et pour les feux stop, il faut un minimum 0.6 lux à 10m. D’ailleurs, souvent, les voitures ont un coefficient bien plus important que les exigences minimales imposées par les normes, afin d’augmenter la sensation de sécurité de l’automobiliste.
Fig 1.Comparaison entre lux et lumen (cf Livre Blanc des tests FUB)
Mais quelles sont les caractéristiques d’un éclairage à led ? Pourquoi faut-il une optique ?
La puissance électrique que peut accepter la ou les leds est transformée en lumen avec un angle
de 120° et un rendement d’environ 70%. Donc, un refroidisseur alu doit dissiper les pertes. Puis, une optique doit concentrer le flux lumineux sur un angle d’environ 5° à 20° pour fournir un éclairement en lux à une certaine distance.
L’optique peut concentrer le flux lumineux différemment en fonction de l’espace pour ne pas provoquer d’éblouissement. Les performances d’une led peuvent aller de 30 lumen/watt à 120 en fonction du fabricant et de sa température. Par conséquent, seul l’éclairement (lux et à une certaine distance) donne une bonne indication des performances.
Fig 2.Rôle d'un angle de diffusion dans la perfirmance d'un éclairage avant (cf Livre Blanc des tests FUB)
Quelle est la sensation de sécurité pour le cycliste ? Quelle est la distance estimée d’un automobiliste d’être vu ?
De nombreuses études scientifiques [8]. démontrent que la sensation qu’a un cycliste d’être bien vu, de nuit comme de jour, est surestimée. D’ailleurs, de nombreuses personnes n’utilisent pas le vélo comme moyen de locomotion de nuit, car elles ne se sentent pas en sécurité avec un éclairage de vélo.
À titre d’exemple : avec un éclairage à l’avant de 3W, fournissant 250 lumen, un cycliste roulant à 15km/h estime qu’il est vu à 74m alors qu’il ne sera en réalité vu qu’à partir de 26m par un automobiliste roulant à 40km/h, en sens contraire [8].
L’œil humain permet de s’adapter à l’éclairement entre 10 lux et 10 000 lux. Mais, l’œil subit un l’éblouissement de nuit avec une augmentation rapide de seulement 10 lux. Par conséquent, en fonction de l’angle émis de l’éclairage et de son inclinaison, un éblouissement est possible. Donc, pour les éclairages puissants, plusieurs niveaux de puissance sont nécessaires, afin de ne pas provoquer d’éblouissement et d’augmenter l’autonomie.
De plus, la fixation des éclairages doit être correcte pour que l’angle d’inclinaison ne soit pas dérèglé avec les vibrations en cours de déplacements. Cet angle d’inclinaison peut se régler en quelques secondes, en éclairant un mur. Plus l’angle de l’optique est petit/aigü et moins il éblouira. D’ailleurs, il existe des éclairages à plusieurs leds permettant d’avoir plusieurs angles en fonction du mode d’éclairage sélectionné. Certains éclairages ont des focales variables…. Par conséquent, de nombreuses solutions techniques sont possibles.
Mais quelles sont les statistiques d’accidentologies sur le vélo avec ou sans éclairages ?
De nombreuses études internationales [4] démontrent que l’utilisation d’un éclairage de jour permet de réduire les risques d’accidents en vélo de 20%, mais sans indiquer la puissance utilisée. Les bilans statistiques sur les accidents des cyclistes proposés par l’IFSTAR et la sécurité routière [5] sont nombreux. Mais les statistiques ne tiennent pas compte de l’utilisation par les victimes d’un éclairage ou non. Ils ne retiennent que le nombre d’utilisation du vélo, le trafic, la météo [10][11] etc.
Le besoin d’éclairage d’un vélo, et la puissance d’éclairement à telle ou telle distance, va dépendre de son type d’utilisation, de sa région et de sa vitesse.
Par exemple : le besoin en éclairage va être diffèrent pour les vélos de courses, dont la masse est primordiale afin d’avoir de bonnes performances de vitesse. Mais il peut y avoir du brouillard le jour et les entrainements peuvent se faire tard le soir.
D’ailleurs, la réglementation allemande sur les licences routières, StVZO, n’oblige pas d’équiper les vélos de course en dispositifs d’éclairage, mais impose un éclairage fixe pour tous les vélos de villes. Alors que l’éclairage est en général surtout utile pendant les 5 mois d’hiver.
Fig 3.Répartition des décès de cyclistes
En effet, un vélo-tafeur qui doit partir tôt et revenir tard en utilisation pendulaire quotidienne aura besoin en fonction des conditions d'éclairage et de la journée d’avoir un éclairage minimal. Et sans éclairage public, les vélo-tafeurs doivent avoir une puissance d’éclairage encore plus importante pour voir les déformations de la voirie.
Sur les vélos partagés et de nombreux vélos de villes, des dynamos moyeux à 35€ pour 580g ou bouteille à 10€ pour 210 g sont utilisées en fournissant au maximum 3 Watt sous 6Volts. Leurs avantages sont de ne pas tomber en panne d’électricité et de ne pas utiliser de batteries. Cependant, des aimants Néodyme (terre rare) sont utilisés impactant la planète avec de l’électronique plus importante, nécessaire pour le chargement d’une super-capacité qui permet d’avoir un dixième d’éclairage pendant quelques minutes lors d’un arrêt à un feu rouge. Cette faiblesse d’éclairage lors de l’arrêt est relativement insuffisante pour être vu.
A partir de la dynamo et d’un régulateur, il est possible de recharger lentement un smartphone ou des éclairages à batterie. Ces régulateurs USB ont un coût qui oscille entre 20 € et 125 €. L’éclairage par dynamo est donc très limité au niveau performance et n’est pas bon marché et il ne sera pas possible d’alimenter 13Watt d’éclairage pour être vu de jour.
D’ailleurs, certains fabricants de dynamos font déjà depuis quelques années des dynamos avec une puissance de 8W pour un prix de 200€ [9] afin de satisfaire les clients.
Pourquoi les ampoules halogènes sont interdites à la vente, alors que certains vélos partagés utilisent toujours cette technologie qui produit 10 fois moins d’éclairage qu’une led ?
Car cette technologie est très bon marché : à peine 7 € pour un éclairage avant ou arrière, permettant d’être utilisé avec des dynamos sans électronique. Donc, il n’y aura pas de vol sur un produit peu performant ou sera remplacé à moindre coût. La puissance d’un éclairage à ampoule pour l’avant est de 2.4W. Les performances d’éclairages sont données sur la figure suivante.
L’éclairage arrière à ampoule avec 0.7W donne 10 lux à 10cm donc 0.001 lux à 10m. Donc 40 fois moins qu’un minimum requis pour une voiture.
L’avantage principal de l’ampoule halogène c’est son prix, qui est de 2,5 € aujourd’hui. Avant les années 1990, il n’y avait pas trop de choix et les cyclistes devaient faire avec ces ampoules. Et pour être mieux vu des catadioptres ont été obligatoire.
Fig 4.Puissance 2.4W, 10 lumen, angle 36°, éclairage au sol 20lux à 4m et 5lux à 7m, 1lux à 10m.
Est-ce que les catadioptres sur les roues et les pédales sur les éclairages sont mieux que d’autres systèmes ?
Car depuis plus de 15 ans, il existe des pneus dotés de bandes réfléchissante de classe 1 pour 4g. De ce fait, les catadioptres (réglementaires) en plastiques de 42g à 4€ par roue sont-ils devenus inutiles ? En complément, des stickers de 1 cm de large, de 8 mètres de long et de25g, de classe 2 à seulement 1€ peuvent être collés sur la jante et le cadre.
Evidemment, un gilet jaune de classe 1 améliore la visibilité grâce à sa surface réfléchissante importante, mais il est peu adapté aux vitesses rapides et à l’utilisation d’un sac à dos. Mais depuis plusieurs années, les fabricants de vêtements de cyclistes ajoutent de plus en plus de réflecteurs de classe 1. Ils font de même sur les sacs à dos.
Est-ce que les fabricants d’éclairages donnent des informations techniques sur les éclairages ? Est que le packaging des fabricants permet de faire un choix ? Est-ce que les caractéristiques données sont fiables ?
Suite aux études menées sur des éclairages [1], on a pu constater que 50% des caractéristiques mises en avant sur les emballages et les descriptifs des produits sont fausses. En effet, pour mieux vendre, les distributeurs et les fabricants fournissent des caractéristiques techniques avec des valeurs « bodybuildées ». Souvent, les photos d’éclairages ne sont pas représentatives, car la focale, la sensibilité de l’appareil photo peuvent donner un rendu différent de ce que l’on voit en réalité. De plus, la distance d’éclairage n’est pas indiquée sur la photo.
Certains packagings donnent des informations comprenant, certes des valeurs objectives, mais aussi parfois subjectives.
Exemples :
- Sur la figure ci-contre, pour un éclairage arrière USB, les valeurs objectives telles que les lumens, l’angle, l’autonomie, la capacité énergétique, l’indice de protection sont données sur le même niveau qu’une estimation sur la sensation de visibilité e pleine nuit, qui est une donnée subjective.
Fig 5.Packaging éclairage arrière MSC.
- Sur le packaging de l’éclairage ci-contre, l’autonomie est indiquée, mais pas l’angle, ni la puissance, ni les lumens, ni les lux. Seule une notation de 9/10 propre au fabricant indique la distance à laquelle le cycliste peut être vu, alors que pour un éclairage avant, on souhaiterait connaître la distance d’éclairage, avec une valeur en lux à une certaine distance. La notation a cependant pour objectif louable d’essayer d’aider au choix et de vulgariser des données techniques.
Fig 6.Packaging VIOO 900 B TWin
Est-ce que les commentaires en ligne de clients ou les blogs et forums aident à choisir un produit ?
Les commentaires en lignes peuvent détruire une e-réputation. Ils sont devenus une norme de satisfaction, mais malheureusement sans aucune valeur scientifique. Sur certains sites, les commentaires sont modérés et s’ils sont trop négatifs, ils ne paraissent pas. Donc les commentaires sont malheureusement peu fiables, alors que 88% de personnes les regardent et sachant que 31 % de gens font des commentaires 1 fois par mois. De plus, plus d’un tiers des commentaires serait faussé. Certains blogs et influenceurs sont rémunérés par la marque ou le distributeur donc les avis ne sont pas impartiaux. Ces blogs reprennent juste les données techniques sans les vérifier.
Fig 7.Notation d’éclairage pour une estimation de visibilité.
Parfois, il arrive qu’on trouve plus d’informations techniques sur internet sur les caractéristiques que sur le packaging d’un éclairage. Mais c’est très rare. Souvent seules les marques émergentes d’éclairages font de la transparence technique, pour mieux valoriser leurs produits.
Exemple :
Sur la figure ci-contre, on peut observer la cartographie des éclairages au sol et sur un mur. Mais, ces cartographies ne vont peut-être pas être comprises des profanes ?
Fig 8.Éclairage Meilan X1.
Aujourd’hui, certains packagings permettent de tester l’éclairage dans le magasin par un interrupteur est accessible. Mais, le choix de dispositif d’éclairage vélo en magasin est limité par rapport au choix proposé par la vente en ligne, car le secteur de la fabrication des éclairages vélos est très concurrentiel.
Est-ce que la réglementation française exige minimum de performances pour les éclairages vélo ?
A ce jour, aucun niveau de performances n’est demandé. Par contre, la réglementation française exige que les vélos neufs soient équipés d’un éclairage. Mais souvent, les éclairages fournis avec un vélo neuf sont de médiocre qualité, offrant des performances très faibles. Par conséquent, cet éclairage reste sur une étagère, pour finir à la poubelle.
De plus, l’IFSTAR signale que 50% de cyclistes n’ont pas d’éclairage de nuit à cause de nombreux facteurs tels que : l’oubli, plus de pile, pas chargé, ne fonctionne plus, n’a pas envie d’investir…. Faute d’éclairage, certains cyclistes utilisent la led de leurs smartphones pour être vus de nuit….
Le comportement humain a toujours été gaussien avec des personnes très rigoureuses et d’autres laxistes. De plus, l’utilisation du vélo par un cycliste peut changer à tout moment à causes de nombreuses circonstances. Par conséquent, un éclairage polyvalent, permettant d’être vu de jour comme de nuit, avec différents modes de puissance sera mieux adapté qu’un éclairage qui ne se destine qu’à un usage bien précis. Les tests sur les éclairages [1] avec 10Watt à l’avant pour 20 € et 3Watt à l’arrière pour 5€ permettent de satisfaire à pratiquement toutes les exigences des déplacements en vélos et réduire l’accidentologie.
Les fabricants de motorisation de vélos électriques (Bosch, Shimano et Yamaha) ont prévu une puissance de 9W sur le branchement de l’éclairage et un branchement d’USB B pour recharger son smartphone (5W). L’amovibilité des éclairages USB permet les avantages indéniables de pouvoir réparer son vélo de nuit, en l’éclairant avec la lampe déposée, d’être retiré contre le vol lors des stationnements, d’être enlevé pendant la période estivale, de pouvoir migrer sur un autre vélo facilement, d’avoir d’autres usages quotidiens... Pour minimiser les comportements humains laxistes sur la recharge régulière des éclairages USB, un indicateurs à 20% d’état charge est le bienvenu.
En Conclusion, des lois contraignantes ne permettront jamais de faire la promotion de la mobilité du vélo. Chacun doit pouvoir faire ce qu’il désire sans nuire à autrui mais si les fabricants et le marketing des accessoires de vélo était plus transparents sur les performances de leurs produits, alors que cette mobilité pourrait être améliorée à moindre coût, en fonction de son utilisation. C’est là que les organismes de protection de consommateurs, de même que le législateur devraient imposer des obligations. Mais, de nombreuses personnes candides vont avoir du mal à comprendre des informations techniques, à moins qu’une base de connaissances sur l’éclairage intègre un jour dans référentiel du système scolaire et donc la culture générale. Sinon il reste les encyclopédies, les publications en ligne pour appréhender les tenants et aboutissants des éclairages [3][2].
Pour une utilisation de masse du vélo, le prix des accessoires de vélo doivent être minimum par rapport au coût de la vie. Le coût d’un éclairage va dépendre surtout de son volume de production et de la marge faite par le fabricant. Mais certaines technologies d’optiques ne permettent pas de réduire les coûts est resteront inabordables pour beaucoup.
Bibliographie avec lien internet
[2] Eclairage vélo par Wikipédia
[3] Bicycle_lighting wikipedia
[4] Test d’éclairage de jour sur l’accidentologie des cyclistes :
[5] bilans sur les accidents des cyclistes, sécurité routière:
[6] « Éclairage de vélo : de l’aide pour les LED » Revue technologie, juin 2017 :
[7] Eclairage de véhicules normes ECER112 113 STVZO, Revue 3EI N°100 janvier 2020
[8] The Difference in Night Visibility between Shared Bikes and Private Bikes during Night Cycling with Different Visibility Aids
[10] Statistique accident vélo
[11] Analyse des statistiques vélos partagé NYC
Présentation de l’auteur : Arnaud Sivert, membre de la Commission Eclairage de la FUB et responsable des tests de laboratoire
Arnaud Sivert est maître de conférence au département génie électrique de l’IUT Aisne de Soissons. Vélotafeur depuis l’adolescence, depuis 2011, il roule à 50% en vélo couché, 40% en velomobile et 10% en vélo droit. Il a réalisé de nombreuses publications nationales et internationales sur les véhicules à faibles consommations électriques, de moins de 50kg, mais aussi sur les différentes technologies de batteries, sur des solutions de recharges en 1 heure, sur la démonstration de performances en matière d’éclairage et de pneus de vélos.